une création du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui et du Théâtre P.A.F.
Salle Michelle-Rossignol
29 janvier au 17 février 2024
RÉSUMÉ
Six personnages aux prises avec les défis du monde contemporain voient leurs certitudes s’effriter au contact de l’œuvre révolutionnaire de l’artiste visuelle Judy Chicago. Alors qu’ils sont confrontés à des conflits intérieurs et des interrogations sur leur place dans la société, cette figure marquante de l’art et du féminisme devient le catalyseur de leur métamorphose, les poussant à remettre en question leur propre identité et leurs convictions profondément enracinées.
L’autrice et metteuse en scène Gabrielle Lessard offre une réflexion profonde sur la liberté artistique, l’identité personnelle et la résistance face aux forces antagonistes de notre société. Honorant les combats incessants d’une artiste qui a tracé la voie pour les générations futures, Judy souligne l’importance de l’art en tant que force de changement et célèbre la capacité de l’individu à se réinventer et à défier les normes sociales établies.
texte et mise en scène Gabrielle Lessard interprétation Louise Cardinal, Jérémie Francoeur, Louise Laprade, Noé Lira, Noémie O'Farrell, Anna Romagny, Victor Andres Trelles Turgeon assistance à la mise en scène et régie Erika Maheu-Chapman dramaturgie Chloé Gagné Dion scénographie Étienne René-Contant lumière Tiffanie Boffa, Cédric Delorme-Bouchard musique Frannie Holder costumes Elen Ewing accessoires Marie-Jeanne Rizkallah maquillages et coiffures Sylvie Rolland-Provost sonorisation et régie son en alternance Gabrielle Couillard assistance à la musique et régie son en alternance Marie-Frédérique Gravel assistance aux costumes Fany McCrae direction de production Marjorie Bélanger direction technique Xavier CôtéJe n’ai aucun souvenir du moment où j’ai décidé, il y a trois ans, de me procurer les autobiographies de Judy Chicago. Elles ont atterries dans ma boîte aux lettres un bon matin. J’avais dû les commander ! Quelques jours plus tôt, j’étais tombée sur une photo de ses Smoke bodies dans une revue dédiée à l’art. Mon cœur avait légèrement accéléré. Je suis devenue subitement impatiente. C’est tout ce dont je me souviens : une intuition. Le reste n’est qu’impulsions. Et grands bouleversements.
Un autre souvenir clair. Je suis dans la salle d’attente de l’hôpital Sacré-Cœur pour un suivi post-opératoire. On m’a récemment retiré, juste à temps et sans complications, un mélanome malin du pied. Je suis en attente pour qu’on change mes pansements. Je ne vais pas mourir. Pas maintenant en tout cas. Mais je ne ressens aucune sorte de renaissance ou d’illumination comme on nous le décrit dans les films et les récits de ceux qui réalisent subitement que la vie est fragile et qu’ils ne faisaient finalement que l’effleurer. Moi, cette sensation m’habite déjà depuis quelques années. Elle s’insinue en moi, me fait rester couchée le matin à assister de sous les draps aux démarrages répétés du quotidien : l’amoureux gentil qui fait déjeuner l’enfant en pleine santé, les bruits de la routine et des êtres qui se remettent en marche. Moi j’étouffe. Je me cache sous les draps et pense à toutes ces heures vierges devant moi. Je les trouve menaçantes, je ne sais pas comment les saisir. Je me répète que j’ai tout ce qu’il faut pour être heureuse, et au lieu de m’apaiser, ça me fait suffoquer.
Donc je suis morte-vivante, et même cette possibilité (évitée) de ma propre mort ne suffit pas à remettre en mouvement les grandes pulsions qui m’ont menée à l’art, au rêve, à l’amour et à la création. Et ce matin de suivi, dans la salle d’attente d’un hôpital gris, il y a plus de deux heures de retard sur les rendez-vous. Je plonge ma main dans mon sac et attrape la première autobiographie. Je commence à lire, et le choc tant attendu, douloureux mais fulgurant, se produit. Je rencontre Judy. Ses luttes, ses contradictions, son combat encore actif aujourd’hui pour que son art, c’est à‑dire son identité, car le processus créatif est pour elle identificatoire, soit reconnu et validé pour ce qu’il est, ainsi que sa parole féministe.
Moi qui me croyais progressiste, féministe et éveillée, je réalise au contact de cette militante de la deuxième vague du féminisme que je suis la réincarnation de ce qui me terrifie dans ma conception d’une femme des années cinquante. Non pas que je dénigre le choix d’être au foyer, de construire son identité sur des valeurs sociales établies, mais il me semble que je n’ai jamais consciemment acquiescé à cette identité. Elle s’est subtilement imposée. Je me suis vue soudainement pour ce que j’étais, écartelée, découpée en plusieurs parties de moi, toutes rangées dans de petites boîtes d’entreposage. Un entreposage cinq étoiles, mais un entrepôt quand même.
Et la magie Judy se poursuit. Au retour d’une pandémie, qui s’est avérée être pour moi la prolongation obligée d’une déjà bien longue et périlleuse acclimatation à la maternité, le téléphone sonne. C’est Sylvain Bélanger qui me demande ce sur quoi je travaille en ce moment. Je lui parle de Judy. Tiens ! C’est justement l’artiste préférée de Michelle Rossignol, récemment décédée, dont l’argent légué servira à soutenir de jeunes créateurices à trouver et déployer leurs voix. Il m’offre la première résidence d’écriture d’un mois associée à cette bourse. Ces trente jours de solitude m’ont permis de plonger dans des lectures féministes.
Comme Judy se nourrissait et entretenait la grande toile d’une histoire alternative, parallèle et oblitérée de celle avec un grand « H », j’ai élargi ma compréhension d’une pensée qui va bien au-delà de la simple dualité genrée de deux parts de l’humanité. J’ai reconnu dans ce désir d’universalité et d’amour la porte d’entrée au vrai changement, celui qui fait mal, qui demande de mourir un peu, qui laisse des traces et qui n’est jamais acquis. Ma vie a explosé. C’est la grande force de l’artiste : toujours remettre sur le métier ces forces vives de l’humanité, le beau comme le moins beau. Et s’accrocher, dans l’inconfort et l’adversité, dans la recherche perdue d’avance de consensus, dans le réagencement constant du réel pour court-circuiter les engrenages persistants d’un réel mis au service d’un système capitaliste qui exploite, domine et siphonne le vivant.
Du haut de ses 84 ans, c’est ce que Judy choisit de faire tous les matins. Parce que créer, pour elle comme pour moi, c’est s’accrocher à l’amour de l’humanité, et qu’elle m’a donné le courage de me relancer dans l’écriture, l’imagination et la réinvention du vivant en suivant mes propres pulsions et en me méfiant des cases.
Gabrielle Lessard
P.A.F. pour :
Le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui est entièrement dédié à la dramaturgie d’ici. Depuis plus de cinquante ans, il supporte la création, la production et la diffusion d’œuvres québécoises et canadiennes d’expression française. Il défend un théâtre d’auteur ainsi qu’une réflexion moderne et sans compromis sur les enjeux contemporains. Adhérer au CTD’A, c’est laisser sa trace dans l’histoire ; la nôtre, celle qui s’écrit au présent.
Album
Publié le 17/02/24Vidéo
Plongez dans l’univers éclaté de Judy, où six personnages aux prises avec les défis du monde contemporain voient leurs certitudes s’effriter au contact de l’œuvre révolutionnaire de l’artiste Judy Chicago. Une bande-annonce signée Camion Productions.
Critiques
Publié le 05/02/24« Des histoires qui se déploient avec un souffle dramatique puissant, magnifiées par une scénographie et une mise en scène inventives. »
Jean Siag, La Presse
Critiques
Publié le 03/02/24« J’en aurais pris encore. C’est un petit délice. […] C’est simplement un texte qui est formidable, tenu par des comédiens formidables, dans une mise en scène où l’on ne s’ennuie jamais. […] On ne peut pas faire tellement mieux. »
Georges Nicholson, Culture club, Ici Première
Album
Publié le 30/01/24Entrez dans l’univers éclaté de Judy grâce à cette superbe série de photos signée Sylvie-Ann Paré.
3900
Publié le 24/01/24L’autrice et metteuse en scène de Judy, Gabrielle Lessard, répond aux 6 questions posées par notre directeur artistique Sylvain Bélanger. Elle nous parle entre autres du parcours, des idées et des combats de l’artiste visuelle qui a inspiré le spectacle, Judy Chicago.
Album
Publié le 08/01/24Vidéo
Album
Publié le 21/11/23Photos : Valérie Remise
Nouvelle
Publié le 09/05/23Nous sommes heureux de vous annoncer quatre représentations avec surtitrages français la saison prochaine Nzinga le 18 novembre 2023 ; Judy, le 10 février 2024 ; Chevtchenko, le 16 mars 2024 ; S’enjailler, le 27 avril 2024. Plus d’informations : ici.
Extrait
Publié le 02/05/23 Judy de Gabrielle Lessard« Tout brûle
On peut pu éteindre les lumières
Profitons-en pour sentir
Ce que ça veut dire
Faire partie du monde »
Album
Publié le 02/05/23Jérémie Francoeur, Noémie O’Farrell et Victor Andres Trelles Turgeon sont saisissant·es sur l’affiche de saison de Judy, pièce inspirée de l’artiste visuelle Judy Chicago (photo : Julie Artacho, design : Gauthier).
DURÉE
ACCESSIBILITÉ
Pour faciliter l'accès aux personnes ayant une déficience auditive, la représentation du 10 février sera présentée avec surtitres français. Pour avoir accès aux places offrant la meilleure visibilité sur les surtitres, nous vous conseillons de réserver par courriel à billetterie@theatredaujourdhui.qc.ca.
Pour en savoir plus sur cette représentation et sur nos différentes mesures, consulter notre page d'accessibilité universelle.
PRODUCTION
une création du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui et du Théâtre P.A.F.
Remerciements
Atelier Morel Leroux
Lou Arbour
Alexis Aubé
Philémon Beaulieu
Philippe Bélanger
Sylvain Bélanger
Geneviève Boivin-Roussy
Vladimir Cara
Kevin Clément
Gabrielle Couillard
Charles Desjardins
Fred Dessoly
Marcelle Dubois
Nicolas Dupuis
Jeanne Dupré
Geoffrey Gaquère
Chloé Giroux-Bertrand
Alain Jenkins
Anaé Lajoie Racine
Estelle Lessard
Gabriel Lessard
Fany McCrae
Marc-Olivier Novak
Victor Papineau-Holdrinet
Erika Parra Bernal
Hugo Pires
Wendy Kim Pires
Judith Rémillard
Eric-William Quinn
Chloé Rivest
Jules Roy-Sicotte
Alexy Trottier
Mélanie Turcotte
Bouguette le chat
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FONDS MICHELLE-ROSSIGNOL
Première récipiendraire du Fonds de dotation Michelle-Rossignol, Gabrielle Lessard a bénéficié d'une bourse d’écriture pour le spectacle.