Akuteu

GUEULE OUVERTE 

Je n’ai pas toujours été enclin à prendre la parole. Jeune, j’ai dû aller voir un spécialiste pour qu’il s’assure que j’entendais bien, parce que je ne répondais pas quand on me parlait. Je restais silencieuse, concentrée sur d'autres tâches qui me paraissaient plus importantes. Écrire c’était pire que parler, je dessinais ou m’enfermais dans mon garde-robe pour me parler à voix basse. Les mots, je les ai crains toute ma vie. J'ai eu peur de rester prise à l’intérieur d’eux. Je me suis donc mise à utiliser le corps comme langage, comme mémoire du geste ancien et la voix s’est transformée en un chant, une prière, un cri.

Je ressens maintenant le besoin de dire certaines choses en les écrivant. Nommer les blessures, les incompréhensions, les doutes et les dualités, mais aussi les joies, les apprentissages et les souvenirs.
Un grand merci à Suzie Bastien, grâce à elle, j’ai déployé mes mots et j’ai appris à aimer écrire.

Je suis retournée vers moi, mon enfance, ma voix enfouie.
J’ai écrit beaucoup.
Entre poésie et autofiction.
Des parcelles de corps et d’âmes toutes un peu plus personnelles les unes que les autres.
À travers frustrations et réconciliations personnelles, ce texte a pris forme.
Il est devenu une revendication de mon âme, de mes désirs et de mes tourments. Il incarne une partie de mon territoire.
Mon chemin vers la prise de parole, semé de doute.
Avec lui, je désire créer un lien intime avec le public.
Je veux m’offrir à lui comme l’orignal.

Soleil Launière 

Intuition

Hiver 2021, deuxième vague d’une longue série de ressacs…

Je reçois un coup de fil de Soleil.

Émue, je bafouille probablement, devant cette confiance manifeste, ce désir - réciproque - de cette rencontre avec moi. Dans cet hiver « en suspens » où rien de ce que goûte la vie, goûte la vie (littéralement), l’eau me revient à la bouche : je dis oui. Depuis, je suis toujours traversée par cet heureux vertige d’aller vers… à la rencontre de… À commencer par Soleil (la-bien-nommée) et toute cette communauté de magnifiques humain·e·s réunie ici autour d’Akuteu.

Pour moi, à cette étape-ci, c’est d’être aux aguets de ce qui prend vie - probablement la meilleure posture pour assister à ce qui se révèlera par lui-même. Donc, peu de certitudes. Que la certitude de l’importance d’emmener la parole de Soleil à la scène, l’authenticité de cette parole jusqu’à vous.

C’est toujours un exercice acrobatique de traduire en mots un objet qui prend forme, qui émerge, au moment où ces lignes s’écrivent. Le matériau est en mouvance, on y explore encore ce qui n’est pas visible. Apparait une lueur, peut-être l’ombre d’un cèdre… Un corps qui se meut entre ciel et terre, habité par l’écho de toutes ces voix enfouies : celles des ancêtres mais aussi des Staceys. Et celle de Soleil, 5 ans, qui, entre dualités et tourments, préférait se taire... Ça s’inscrit toujours dans le silence pour qu’une voix s’élève et ce, résolument pour elle-même. Soleil parle d’un cri, ses mots hésitent, puis s’alignent, restent en suspension, trouvant leur juste place, et dans ce transport, nous traversent. Et résonnent pour tant d’autres.

Dans cet espace de rencontre, le chemin encore à parcourir serait de s’écouter, nommer, marcher l’un vers l’autre, peut-être même ensemble, côte-à-côte à l’intérieur de cet interstice.

C’est mon désir, c’est à cela que je vous convie.

Johanne Haberlin

« Le point de vue de Soleil Launière est non seulement valide, mais il est unique et nécessaire, donnant accès à une langue, à une expérience et à une sensibilité, une parole libre qui autorise beaucoup d’espoir pour la suite des choses. » 
Christian Saint-Pierre, Le Devoir

« L’interprète alterne avec brio les moments où elle parle librement de son enfance et de sa famille, et ceux dans lesquels elle évoque les traditions, pose des gestes ancestraux ou danse. La salle s’éclaire quand elle converse avec le public. Ce dernier est alors invité à réagir. La franchise, la naïveté et les constations amères de la jeune femme sur les clichés concernant les Autochtones provoquent rires, acquiescements et remous. » 
Charleyne Bachraty, Jeu, revue de théâtre

« La puissance de l’écriture est mise en valeur par un travail de scénographie à saluer [...]. Sons et lumières renforcent remarquablement la poésie du texte et contribuent véritablement à construire cette atmosphère intimiste que l’écriture exprime. » 
Margaux Hujda, Atuvu.ca

« Les qualités de l’ensemble de sa prestation confirme que Soleil Launière est là pour enchanter encore et encore le monde de sa vision qui sait accorder la place autant au passé qu’au futur, le sien et celui des siens, dans un monde encore trop indifférent ou carrément hostile.[...] Cette création prouve la nécessité de sa démarche exploitant une riche palette de couleurs. Akuteu démontre aussi qu’elle possède tous les outils dramaturgiques et scéniques pour un atterrissage réussi sur la planète, sa planète, théâtre »
Mario Cloutier, En toutes lettres

« Akuteu est tout à fait à sa place dans l’intimité de la Salle Jean-Claude-Germain du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, salle qui a souvent accueilli des spectacles auto- ou semi-autobiographiques. » 
Yanik Comeau, Théâtralités

Fondée et dirigée par Soleil Launière, Production AUEN a pour mission la création et la production de performances artistiques s’inspirant du théâtre physique, de la danse contemporaine, du chant traditionnel et contemporain. Les créations entremêlent la présence du corps bispirituel et l’audiovisuel expérimental tout en s’inspirant de la cosmogonie et l’esprit sacré des animaux du monde Innu et expriment une pensée sur les silences et les langages par le corps. Production AUEN a comme objectif de faciliter l’organisation et le développement des projets et mettre en lumière les valeurs qui sous-tendent la vision artistique et les réalisations de Soleil Launière. Au coeur de cette vision se trouve l’inclusion, l’égalité des genres, l’ouverture à l’autre, l’écoute et l’apprentissage. Nous sommes engagées à ouvrir le dialogue entre cultures et générations et à favoriser la transmission de connaissances.