Clandestines

Et si ?

24 juin 2022. Nous sommes dans un café de Brooklyn. Nous venons de trouver la fin de notre pièce, cette saga sur laquelle nous travaillons depuis quatre ans. Nous sommes dans ce café de New-York et voilà que la nouvelle tombe. Roe contre Wade est annulé, six juges contre trois ont déterminé qu’à partir de maintenant, les cinquante états pourront restreindre et interdire l’avortement. Librement.

Voilà que la dystopie que nous croyions écrire n’en est plus une, ici, maintenant. Silence. Pour honorer la mémoire de toutes ces personnes, toutes ces femmes, surtout, qui ont milité pour que le droit de décider de son propre corps nous appartienne. Silence. Pour pleurer toutes ces personnes qui sont mortes des complications dues à des auto-avortements et toutes celles qui en mourront.

Nous sommes nées en 1983. L’avortement a été décriminalisé en 1988. Nos mères n’étaient pas maîtresses de leur utérus. Nous sommes la première génération de notre lignée à bénéficier de l’accès à ce soin de santé. Et encore, cet accès n’est pas le même sur tout le territoire. Comment est-ce possible que ce droit soit retiré à nos consœurs et nos confrères, ici maintenant, sous nos yeux ? Nous ne sommes pas surprises, puisque nous collaborons depuis quatre ans avec des expert·es qui connaissent bien les rouages de ces changements sociaux. Nous ne sommes pas surprises, mais la colère et la douleur n’en sont pas moindres. Nous marchons dans les vestiges des manifestations et nous pensons à vous qui viendrez réfléchir avec nous. Et nous avons peur. Une peur que nous ressentons pour la première fois.

Il faut admettre qu’il n’a jamais été aussi urgent de regarder en face la question du droit à l’avortement. Sommes-nous à l’abri d’un tel recul ? Qu’est-ce que ça implique d’être pro-choix ? Comment ça s’organise, un renversement ? Comment ça s’organise, à l’intérieur de soi ? Nous avons choisi de nous prêter au jeu dangereux de chercher les brèches dans nos systèmes. Pour apprendre ensemble à nous protéger. Avant qu’il ne soit trop tard.

Marie-Ève Milot
Marie-Claude Saint-Laurent

JOSIANNE DULONG-SAVIGNAC, en tête de liste et en Caps Lock pour la valeur de tout ce que tu sais faire, de tout ce que tu insuffles à nos créations, et pour le jusqu’à‑pas‑d’heure quand on cherche fort ou qu’on est juste trop heureuses d’être ensemble.

Antoine, Anne-Sophie, Cynthia, Martin, Marisol, Annie, Nico, Olivier et Justine. La tâche était immense, deux shows en un. Un merci infini d’avoir su saisir, d’avoir su tenir ce thriller jusqu’au bout, tant dans la fiction que dans la réalité. 

Aux interprètes. Vous êtes la présence rassurante de cette dystopie. Votre engagement dans ce spectacle restera dans nos archives, pour toujours. 

Marie-Christine et Xavier, grande cheffe et grand chef, avec qui on veut habiter. (C’tu possible?)

À Quinn et Anaé pour les envolées à l’huile de bras.

Merci à Sylvain pour ta présence, tes retours toujours francs, ton accueil qui fait sentir tout le monde à sa place.

Merci à Johanne pour ton accompagnement, ta précision, et à toute l’équipe du théâtre pour le café Brossard, les jasettes, les solutions et les fous rires.

Véronique Pronovost, merci pour ton expertise, tes vulgarisations et ta militance inspirante. 

Guy-François Lamy pour la profondeur des échanges.

Isabelle Brabant, Marie-Ève Blanchard et Mélina Castonguay, merci pour vos critiques et vos savoirs précieux.

Marianne, Julie et Marie d’Écoscéno, pour le suivi sensible et intelligent, et surtout, pour un futur proche plus responsable.

Eric Allen, merci pour ton regard politisé, tes bonnes idées et ton argumentaire (de droite!)

Sasha Dion et le CEAD pour les ateliers dramaturgiques, ainsi que les interprètes qui sont venus réfléchir avec nous. (Frédéric Blanchet, Martine Francke, Dominique Leduc, Lamia Benhacine, Ambre Jabrane, Catherine De Léan, Sarah Laurendeau, Sylvie De Morais-Nogueira, Joëlle Paré-Beaulieu, Étienne Lou, Tracy Marcelin, Daphnée Côté-Hallé.) 

Chélanie Beaudin-Quintin et Victor Saliba pour la bande-annonce hypnotique.

François Lachapelle pour l’écoute et le partage de la charge mentale.

Sarah Laurendeau et Véronique Côté pour votre courage et immense solidarité.

« Clandestines est sans conteste l’un des textes les plus forts signés par le duo d’autrices Marie-Ève Milot et Marie-Claude St-Laurent. »
Stéphanie Morin, La Presse

« Dans ce spectacle débordant d’émotions, l’interprétation prend une importance capitale. Toute la distribution est à la hauteur de la situation, mais il faut citer la toute première présence sur les planches de l’impressionnante Nahéma Ricci et la performance de la trop rare Diane Lavallée en militante pro-vie. L’autre rôle ingrat, celui du politicien, est solidement assumé par Alexandre Bergeron. […] Sofia Blondin est éclatante dans le rôle de la femme enceinte en colère contre un système injuste. »
Mario Cloutier, Revue JEU

« […] un texte dense et criant d’authenticité. »
Micheline Rouette, BP Arts Média

« Clandestines est ce qu’on pourrait qualifier de pièce-monument. »
Alexi Hachey-Brunet, atu​vu​.ca

« On se trouve devant une œuvre aboutie, entière, aussi intelligemment pensée que présentée. »
Valérie Savard, Spirale 

« La pièce joue sur les limites et nous fait réfléchir aux nôtres. »
Marie Berdin, Notre montréalité

« La pièce expose autant la nuance que la polarisation de certaines positions, mettant en lumière la façon dont les discours à ce sujet sont bien souvent en dissonance. »
Marc-Antoine Franco Rey, Le culte

« Clandestines redonne son humanité à un sujet que l’on éloigne bien souvent de celles qui le concerne le plus. »
Malik Ramjee, Le délit

Le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui est entièrement dédié à la dramaturgie d’ici. Depuis plus de cinquante ans, il supporte la création, la production et la diffusion d’œuvres québécoises et canadiennes d’expression française. Il défend un théâtre d’auteur ainsi qu’une réflexion moderne et sans compromis sur les enjeux contemporains. Adhérer au CTD’A, c’est laisser sa trace dans l’histoire ; la nôtre, celle qui s’écrit au présent. 
 

Les Affamées s’investissent à (re)créer et à faire (re)vivre une culture des femmes en mettant en lumière leurs expériences dans les sphères privée, sociale, politique et artistique. C’est par une analyse féministe des sujets et du processus créateur qu’elles affirment leur engagement. Fondé en 2011, le collectif-à-deux du Théâtre de l’Affamée a signé dix pièces, dont Débranchée/ Unplugged, finaliste au prix Louise-Lahaye en 2017 et Guérilla de l’ordinaire, finaliste au prix Michel-Tremblay en 2019. Marie-Ève Milot et Marie-Claude St-Laurent sont artistes en résidence à la salle Jean-Claude-Germain du CTD’A en 2018 et 2019. Membres du Comité directeur du Chantier féministe de l’Espace Go, elles sont collaboratrices à l’étude menée par les chercheuses du Réseau québécois en études féministes (RéQEF). Avec la doctorante Marie-Claude Garneau, elles ont coécrit La coalition de la robe, un essai publié aux Éditions du remue-ménage, et à trois, elles occupent la codirection littéraire de la nouvelle collection théâtre La NEF.